samedi 2 février 2013

Capitales du monde : Alger

 C ' est, cette fois une visite qui sera sans doute chargée d'émotion pour beaucoup de français et d'algériens dont les familles ont vécu dans ce pays et dans cette ville, et qui, les uns pour des raisons politiques, les autres pour des raisons économiques, ont dû la quitter. Mais cette page est à l'attention de tous les internautes, d'où qu'ils viennent, quels qu'ils soient, sans distinctions. Elle est composée de deux parties : la période actuelle et un flash-back sur la période antérieure à l'Indépendance (1962).

Écu taillé d'azur et de sinople, bordé d'une filière d'or.
Le bateau  représente le commerce et l'activité maritime.
Les deux lions affrontés symbolisent la force
Le croissant et l'étoile de gueules évoquent
 les valeurs de la civilisation arabo-musulmane
 La plume figure le développement scientifique et culturel.
 La gerbe de blé : la vocation première du pays :
 l'agriculture. La roue symbolise l'industrie.
En guise de couronne murale : un fort de style ottoman.
auteur : Ali Ali-Khodja - 1965

capitale n° 6 - Alger

En arabe: الجزائر (al-Jazāir), en anglais : Algiers, en espagnol : Argel  ; capitale de l'Algérie, située sur les bords de la Mer Méditerranée, surnommée poétiquement "la Blanche" à cause de la couleur de ses maisons.

Population ville : 2 915 650  hab. (estimation 2011) ;  + 6 000 000 hab. pour l'agglomération.

Il s'agit de la ville la plus importante du pays, par ses activités tertiaires de capitale, par ses industries, par son rôle historique dans la formation de l'État algérien et la plus grande agglomération du Maghreb, par le nombre de ses habitants. Alger combine les activités multiples d'une grande capitale : politique (ministères, ambassades, administrations), intellectuelle (université, grandes écoles, journaux), financière (sièges des grandes sociétés d'État, des banques). C'est la plaque tournante des transports : port maritime (aujourd'hui très encombré) ; centre routier et ferroviaire ; aéroport international de Dar el-Beida. Une première ligne de métro, desservant dix stations, a été ouverte en 2011 (il s'agit du premier métro du Maghreb et du deuxième métro d'Afrique, après celui du Caire). Des industries différenciées sont développées depuis la fin de la période coloniale dans l'agglomération : raffinage du pétrole, métallurgie de transformation, automobile, agro-alimentaire, bâtiment…
   La population ne cesse d'augmenter dans la ville et dans l'agglomération : elle aurait triplé depuis 1962 (malgré le départ de 200 000 Européens). De fait se posent de multiples problèmes sociaux, de logement, d'hygiène, d'alimentation en eau, de délinquance, de circulation, comme dans toutes les grandes métropoles africaines.  

carte postale d'Alger avec blason "moderne".

timbre algérien commémorant le millénaire
de la ville d'Alger en 1973
emblème du club de football principal d'Alger
incorporant le blason de la ville






















blason extrait du Grand Livre
de l'Héraldique d'Otto Neubecker (1977)

Les emblèmes de la ville d'Alger au XIXe siècle :

gravure Art Nouveau 1893

armoiries de 1860
l'aigle impériale du Second Empire français
surmonte les étoiles et le croissant du blason
de l'Algérie pendant la période française






















  Sur cette carte, extraite de l'Atlas de Vuillemin, édité en 1878, apparait le blason adopté dès 1862, et qui va garder cette forme jusqu'à l'Indépendance de l'Algérie. Après quoi, un grand nombre d'éléments seront conservés dans le nouveau blason dessiné par Ali Khodja en 1965 (celui du début de cette page): le taillé azur-sinople, le croissant, le bateau, la gerbe et le lion qui s'est même dédoublé !

détail du blason en bas à droite
de la carte de Vuillemin

chromo de la série "le Fil Géographique" consacrée aux départements français : ici la province d'Alger (v. 1885) avec la
carte géographique, les traditions et les spécialités locales, et un blason "d’argent au croissant d'or" attribué à la ville d'Alger.



Le blason d'Alger au XXe siècle, jusqu'en 1962 :

chromo publicitaire du début du XXè siècle montrant la cour intérieure de l'ancien  Palais d'Été du Gouverneur d'Algérie,
aujourd’hui c'est la résidence du Président de la République algérienne et il se nomme le "Palais du Peuple". 
 - Écu "byzantin" taillé d'azur et de sinople, à la barre d'or brochant sur la partition, chargée en pointe
d'un lion au naturel, contourné, la patte avant dextre posée sur un boulet du même, en chef un écusson
 de gueules à la croix latine alésée d'argent, brochant sur la barre et sur le champ; sur l'azur : chargé d'un
navire contourné de sable équipé d'argent soutenu d'un croissant tourné du même;
sur le sinople: chargé d'une gerbe d'or posée en barre; le tout à la bordure d'or.
timbre : couronne murale , à coupoles byzantines sommées de croissants d'or, ouverte de gueules.
supports : tapis de palmes d'argent , un ruban d'azur et d'or à la pointe ;
Croix de guerre 1939-1945 avec palme de bronze, appendue à la pointe *.
 (*) La Croix de Guerre a été attribuée par décret paru au J.O. du 10 décembre 1948 et remise à la ville en 1949 par le Président de la République Vincent Auriol lors d'une visite officielle.

La ville d'Alger a reçu également la Croix de la Légion d'Honneur en 2004, accordée par le Président Jacques Chirac, au titre de "capitale de la France combattante" pendant la Seconde Guerre mondiale, ceci à l'occasion du 60è anniversaire du débarquement des Alliés en Provence et où les chefs d'États ont été reçu à Toulon, parmi eux : le Président Bouteflika.
Alger a donc été la cinquième ville étrangère, après Liège, Belgrade, Luxembourg et Stalingrad/Volgograd, à recevoir cette haute distinction de la République française.
Ce geste politique n'a pas été toujours compris ou apprécié par tout le monde, des deux côtés de la Méditerranée. Les relations entre la France et les pays africains sont toujours un sujet à polémiques. Verra-t-on un jour cette croix orner les armoiries contemporaines d'Alger? C'est peu probable...

 Symbolique du blason d'Alger : 
Le lion paraît rendre allégeance à la puissance chrétienne représentée par l’écu de gueules à la croix latine alésée d’argent placé en position dominante. La population musulmane est évoquée au second plan par un croissant d’argent. Il est possible également que l’azur et le sinople désignent respectivement les Français et les musulmans.

Ces armoiries mettent également l’accent sur les activités économiques qui fondent la puissance d’Alger : le port est rappelé par un navire européen d’argent sur un champ d’azur, tandis que la fertilité de la plaine de la Mitidja est soulignée par une gerbe d’or sur un champ de sinople.
Les branches de phénix, sorte de palmier, qui soutiennent le blason d'Alger sont l'adaptation locale du laurier et du chêne qui encadrent traditionnellement les armes des municipalités françaises au XIXe siècle. La couronne murale de style mauresque résulte de la même volonté d’orientaliser les armes d’Alger. Les cinq ouvertures représentent les cinq portes de la vieille ville : Bab-el-Djedid ("la porte nouvelle"), Bab-Azoun ("la porte d’Azoun"), Bab-el-Behar ("la porte de la mer"), Bab-el-Djazira ("la porte des îles") et Bab-el-Oued ("la porte de l’oued").
  source : notice de Jean-Paul Fernon et Nicolas Vernot (extrait de :"l'Armorial des communes de l'Algérie française" Editions Heligoland
 
 
insigne de la 10e Section d'infirmiers militaires (SIM)
basée à Alger juste avant l'Indépendance


insigne de la Base aérienne française BA 210
stationnée à Alger (avant l'indépendance)


 
 
 
Revenons à l'histoire ancienne...
Si on ne devait nommer pour la France, qu'une seule ville, "timbrifiée" et illustrée par ses armoiries plus que de raison dans toute son histoire: c'est bien Alger ! Impossible de dénombrer toutes les variations dans les quatre séries de timbres-poste émises pour l'Algérie seule, puis pour toute la France, entre 1942 et 1960. Oran et Constantine ont aussi reçu une bonne publicité. Ces trois villes étaient les chef-lieux des trois départements qui formaient l'Algérie. Nous allons nous concentrer uniquement sur la ville d'Alger.












jeu n°1 - cherchez les erreurs :  ici on en voit trois !



1ère série : timbres émis entre 1942 et 1945
elle comportait 6 valeurs de couleurs différentes pour la ville d'Alger, accompagnées de 15 autres, ornées des blasons des villes d'Oran ou de Constantine (non représentés ici , je ferai un sujet plus tard).





jeu n°2 - cherchez les erreurs :  ici,  il y en a au moins cinq !


























2è série : timbres bicolores émis entre 1947 et 1949 qui comportait 4 valeurs de couleurs différentes pour la ville d'Alger, accompagnées de 8 autres, ornées encore des blasons des villes d'Oran ou de Constantine.


jeu n°3 :au moins cinq erreurs !



Une troisième série reprenant le style graphique de la précédente sera émise entre 1956 et 1958 pour l’Algérie. Une seule valeur (6F. vert et rouge) sera dédiée au blason d'Alger, les 6 autres seront affectées à de nouvelles villes d'Algérie. Mais déjà un tournant politique s'opère, qu'on peut remarquer sur ces deux timbres. Empêtré dans la guerre de libération du FLN et la situation de crise politique à Alger, le gouvernement de la France nomme au pouvoir le Général de Gaulle en mai 1958.



jeu n°4 :  carte postale de 1961 : le blason ne vous semble-t-il pas bizarre ?
carte postale Barre et Dayez de la grande série des blasons - années 1950
(mêmes anomalies que le jeu n°3 )
carte maximum de 1959 - dessins ( timbre et carte) de Robert Louis

 Le 17 juillet 1958, de Gaulle annonce que dans le souci de symboliser l'unité française, les timbres-poste de métropole seront à nouveau les seuls valables en Algérie à partir du 22 juillet. Et subitement les sujets sur l'Algérie fleurissent dans les nouvelles émissions de timbres de France. Ces deux derniers timbres ci-dessus, dessinés par Robert Louis continuent la grande et célèbre série des blasons des provinces et villes de France. Le premier, de valeur 15F sort le 7 mars 1959 et est abondamment distribué dans les bureaux de poste. Mais il n'y a pas que la situation politique qui pose problème, la situation financière de la France est (déjà ! ) très préoccupante... Une solution est trouvée : dévaluer le franc de 17,55% et pour simplifier les transactions, créer le "nouveau franc"  valant un centième de l'ancien franc.
Ce sera effectif le 1er janvier 1960. Ainsi notre blason d'Alger ressort en 1960 avec cette valeur bizarre : o15 qui signifie 0,15 NF. Parallèlement un autre timbre portant le blason de la ville d'Oran sera émis la même année. Ils seront retirés de la vente en novembre 1962. Entre temps l'Algérie a acquis son indépendance après la signature des accords d'Évian le 19 mars 1962, mettant fin à près de huit ans de guerre.
























Et pour finir les réponses au jeux des erreurs :
  1. la barre est d'argent au lieu d'or, le bateau et le croissant sont d'or au lieu d'argent, et le bateau devrait être contourné ...
  2. la barre est courbée : incorrecte ; le bateau et le croissant sont d'or au lieu d'argent, le croissant devrait être tourné (pointes vers la dextre), dans l'écusson : la croix est grecque , elle devrait être latine (on dirait le blason de la Suisse); le lion est d'or sur le même métal
  3. comme ci-dessus la barre est courbée, le croissant devrait être tourné,  l'écusson devrait brocher sur l'azur, la barre et le sinople, comme ci-dessus la croix n'est pas latine, le lion est de gueules : incorrect.
  4. ce blason est totalement fantaisiste : la couleur de la barre est innommable ; le bateau est en pointe non contourné et pas du bon métal, la gerbe est en chef, le croissant est mal placé et  incorrect, l'écusson également et le lion a perdu la boule !


Je salue et je remercie Jean-Paul Fernon, auteur du magnifique dessin des armoiries (en dessous de la chromo).


capitale précédente  →  Addis Abeba
capitale suivante     →  Amman



 

5 commentaires:

  1. Superbe dossier ! Je prévoyais d'évoquer Alger dans le cadre d'une série "Timbres du premier jour". Je ferai donc le strict minimum avec un lien vers ce billet magnifiquement documenté.

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    1. Ah! désolé Marc, j'ai entrepris de passer les capitales en revue , c'est pure coïncidence. Mais j'ai vu que tu as fait un sujet analogue pour Paris donc je ferai un lien inversement à l'occasion (c'est pas pour tout de suite; avant que j’arrive à lettre P ! "

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  2. N'en sois pas désolé, puisque nos blogs se complètent. Et puis, tout à fait confidentiellement, le travail que tu fournis, je n'aurai plus à le faire :-)

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  3. Très beau travail !!! :D Enorme merci !
    J'ai l'ensemble des photos des timbres de l'Algérie de 1961 à 2017 si vous en auriez besoin un jour !

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    1. Merci à vous. J'en ai mis quelques-uns dans cet autre sujet plus récent où l'Algérie est à l'honneur :
      https://herald-dick-magazine.blogspot.com/2018/12/les-blasons-des-anciens-territoires.html

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