dimanche 7 janvier 2018

l'Armorial de La Planche - 1669 - Gouvernement de Languedoc - Sénéchaussée de Carcassonne

S   uite de la visite d'un des plus anciens manuscrits répertoriant des armoiries de villes et de villages de France, dessinées à la plume et peintes à l'aquarelle, antérieur de trois décennies à l'Armorial Général de France de Charles d'Hozier ! Voir la description initiale : →

Nous poursuivons avec la découverte du "livre" (c'est l'appellation donnée à une section d'un manuscrit, qui est lui-même divisé en chapitres) consacré au Gouvernement de Languedoc. Après  la Sénéchaussée de Toulouse, le pays de l'Albigeois et du Castrais, la Sénéchaussée du Lauragais, nous abordons le quatrième chapitre dédié à la Sénéchaussée de Carcassonne. La plus grande partie de cette ancienne entité administrative, créée juste après la guerre contre les Cathares, couvre le département actuel de l'Aude, avec quelques débordements sur ceux de l'Hérault, de l'Ariège et des Pyrénées-Orientales.





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Voici l'extrait d'une carte datant de la fin du XVIIIe s. , donc postérieure d'un siècle, mais sur laquelle j'ai reconstitué les limites administratives de notre région :
 Vous pouvez cliquer sur toutes les images pour les agrandir 



  Les fragments de manuscrits proviennent cette fois du Volume II. Pour enrichir l'étude, j'ai mis en bonus l'extrait équivalent dans l'Armorial Général de France* (1696-1711), établi par Charles-René d'Hozier, et comme auparavant, j'ai placé le blason actuel en-dessous, pour comparer les différences ou au contraire la constance des figures dans le temps.

(*)  Armorial Général de France  -  volume XIV  -  Languedoc 1ère partie  
       Armorial Général de France  -  volume XV  -  Languedoc  2e partie  (BNF Paris)

Carcassonne (Aude)

  Deux blasons pour la ville de Carcassonne ! Voici brièvement, l'histoire de cette particularité.
 A l'origine la cité s'est développée dans la ville haute, à l'intérieur de ses puissantes fortifications, ancien fief des Trencavel, vassaux des comtes de Toulouse, tous déchus de leurs titres et possessions après leur défaite lors de la croisade des Albigeois. Suite à la prise de la ville et son annexion au domaine royal, une bastide, fut fondée, avec une nouvelle cathédrale, en 1247 sur les bords de l'Aude, formant ainsi la ville basse. Les deux entités ont été pourvues chacune d'un blason : l'une avec l'image de son ancien château comtal, désormais rattaché au royaume de France (l'écusson à trois fleurs de lis), et l'autre avec un agneau pascal d'argent dans un médaillon de gueules, symbolisant l'Église et un semé de fleur de lys d'or pour le roi de France.
   Dans l'Armorial Général de France (édit de 1696) sont enregistrées de nouvelles armes uniques, résultat de la fusion des deux blasons : ville basse/ville haute. Supprimées sous la Révolution, les armes "fusionnées" seront restaurées par lettre patente le 27 février 1819 (règne de Louis XVIII) dans la forme retenue pour l'Armorial Général de France (voir → ICI). Des modifications interviendront plus tard pour aboutir au blason actuel : retour à la porte à deux tours d'argent et du médaillon de gueules autour de l'agneau pascal, sous diverses formes : tourteau, rectangle ou écusson.




Narbonne (Aude)

  La clef symbolise les portes du "Bourg" représenté par les Consuls de Narbonne, la croix archiépiscopale représente "la Cité", siège des archevêques de la province : deux anciennes seigneuries constamment en opposition, mais finalement réunies. Les trois fleurs de lys représentent l'attachement de la ville au royaume de France. La couleur rouge (gueules) est celle des premiers vicomtes de Narbonne qui portaient des armes insolites: "de gueules plain".




Saint-Pons - de - Thomières 
 (Hérault)

  Comme l'indique le titre de présentation de la ville, Saint-Pons était un ancien évêché dépendant de celui de Narbonne. Dans le blasonnement actuel, on parle d'un "arbre de sinople fûté de sable" sans autres précisions. Le manuscrit de La Planche nous révèle qu'il s'agit d'un olivier et qu'il était terrassé et non pas arraché ! Mais c'est un orme dans l'Armorial des États de Languedoc par Denis-François Gastelier de La Tour, édité en 1767 (voir → ICI).




Mirepoix (Ariège)

  Ancienne seigneurie et évêché qui dépendait tantôt du Comté de Foix, tantôt des vicomtes de Carcassonne, la ville fut gagnée par le catharisme à la fin du XIIe siècle. Un concile en 1206 y rassembla 600 cathares. Durant la guerre contre les Albigeois, la ville fut prise en 1209 par Simon de Montfort qu'il donna à un de ses lieutenants : Guy de Lévis, d'où le nom de la famille changé en Lévis-Mirepoix. Par la suite, le pays de Mirepoix fut rattaché à la sénéchaussée de Carcassonne.
  Très souvent, on l'a déjà vu, l'auteur du manuscrit a préparé comme ici,  un emplacement pour y dessiner les armoiries des villes pour lesquelles il a rédigé un descriptif. Mais les écus sont restés désespérément vides. Nous en ignorons la raison : manque d'information fiable, manque de temps, on ne le saura jamais.




Limoux (Aude)

  La figure de Saint Martin sur le blason de cette importante ville de l'ancien comté du Razès se rapporte au patronage de l'église Saint-Martin de Limoux, construite à partir du  XIIe siècle. On remarquera sur le dessin de Pierre de La Planche, la qualité de l'habillement du cavalier, chapeau à plumes compris, à la mode de la fin du XVIIe siècle.   




Alet - les Bains (Aude)

  La petite ville du Razès s'est constituée autour d'une ancienne abbaye fondée au IXe siècle dont l'église sera convertie en cathédrale. Mais les bâtiments et l'église seront détruits durant les guerres de religions qui ravagèrent le sud de la France, à la fin du XVIe siècle et ne seront jamais reconstruits. L'évêché sera toutefois maintenu jusqu'à la Révolution puis dissout après le Concordat de 1801. Les armoiries de cet évêché disparu ont été désormais et sont toujours considérées comme un blason municipal. La croix de procession, les mains jointes (la foi) sont pourtant typiquement de nature religieuse. Les ailes sont certainement des armes parlantes.
  Les armoiries proposées et enregistrées dans l'Armorial Général de France (édit de 1696) montrant un sautoir d'or cantonné de quatre losanges d'argent sur un champ de sable, pourtant d'origine laïques, n'auront pas bénéficié d'une adoption réelle.




Lézignan - Corbières (Aude)


  Encore une fois nous découvrons un blason oublié, avec ces trois belles tours d'argent girouettées, révélé par ce manuscrit .
   En 1696, on attribua à Lézignan, par défaut, en ignorant le précédent blason, des armoiries aux armes de France parce que cette ville dépendait du roi. Vers 1900, les édiles lézignanais jugeant que les armoiries officielles étaient trop royalistes, adoptèrent les armoiries de la famille Niquet (voir → ICI), trouvées au château de Sérame.
 Antoine de Niquet fut, dans la période 1673-1726, un habile ingénieur, qui travailla sous les ordres de Vauban sur diverses fortifications en France et sur les canaux du Languedoc. Il deviendra un très riche bourgeois accédant à un titre de noblesse en récompense des services rendus au royaume, et par l’acquisition d’offices et d’importants domaines dont il fut seigneur (à Montrebech, Sérame, Montfort près de Narbonne, ou Argens).
source texte : www.sesa-aude.fr/Armoiries-de-Lezignan-Corbieres

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D'autres lieux ou villes sont juste décrits par le texte :

- avec un contour de blason vide, sans description comme pour Mirepoix : Saint-Paul (-de-Fenouillet).

- sans blason ni mention s'y rapportant :  Capestang, Nissan (-lez-Ensérune), Sigean, Leucate, Lagrasse, Alzonne, Montréal, Montolieu, Chalabre, Laroque-d'Olmes, Les Alemans, Bélesta, Montségur, Quillan, Caudiès (-de-Fenouillèdes), abbaye de Saint-Chinian-de-la Corne (commune de Saint-Chinian), Cessenon (-sur-Orb).
 
 # cependant, quelques années plus tard, certaines villes (en gras, ci-dessus) ont été enregistrées et blasonnées dans l'Armorial Général de France.  Ces blasons sont pour la plupart toujours d'actualité aujourd'hui, à quelques détails près. Mais d'autres, utilisés actuellement s'inspirent plutôt de ceux publiés dans l'Armorial des États de Languedoc par Denis-François Gastelier de La Tour, édité en 1767 (voir → ICI  ,  ICI  ,  ICI  et  ICI )



Saint-Paul-de-Fenouillet
(Pyrénées-Orientales)


Capestang (Hérault)


Nissan - lez - Ensérune 
 (Hérault)


Sigean (Aude)


Leucate (Aude)

Lagrasse (Aude)


Alzonne (Aude)


Montréal (Aude)

Montolieu (Aude)


Bélesta (Ariège)


Quillan (Aude)


Caudiès - de - Fenouillèdes
(Pyrénées - Orientales)

  Un très grand nombre d'autres villages de la région, nommés "communautés des habitants" (Com. des hañs) dans les registres de l'Armorial Général de France ont été identifiés et enregistrés avec des armoiries la plupart attribuées d'office. Il serait fastidieux de les lister tous ici, d'autant que certaines localités ont été absorbées par les nouvelles communes constituées après la Révolution. Toutefois vous pouvez vous amuser à les rechercher dans les ouvrages numérisés chez Gallica, dont je donne les liens ci-dessous, et accessoirement aussi dans les très intéressantes fiches listées département par département sur le site : armorial de france.fr


A bientôt pour une nouvelle série ...→ ICI


Crédits :
les blasons "modernes" sont empruntés  à : armorialdefrance.fr/


les extraits des manuscrits proviennent de :
- Bibliothèque et Archives du Musée du Château de Chantilly :
   . www.bibliotheque-conde.fr/ressources-en-ligne/
- Bibliothèque nationale de France à Paris : 
   . gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k111467n
   . gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k1114681



             Herald Dick  
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